Devoir d’information précontractuelle dans une cession de parts sociales : le champ de l’information précontractuelle se limite à une information déterminante

Devoir d’information précontractuelle dans une cession de parts sociales : le champ de l’information précontractuelle se limite à une information déterminante

Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 14 mai 2025, n° 23-17.948

Par un arrêt rendu le 14 mai 2025 (n° 23-17.948), la Chambre commerciale précise avec rigueur les limites du devoir d’information précontractuelle imposé par l’article 1112-1 du code civil en précisant que l’information doit avoir été déterminante pour entrer dans le giron de cette obligation d’information précontractuelle. La Cour de cassation vient donc ainsi restreindre le champ de cette obligation.

Faits et procédure

En l’espèce, M. T. avait acquis auprès de M. M. l’intégralité des parts sociales d’une société exerçant une activité de restauration rapide. Peu après cette acquisition, M. T. constata l’impossibilité matérielle d’exercer pleinement son activité dans le local commercial loué, principalement en raison de l’interdiction d’installer un système efficace d’extraction des fumées, notamment indispensable pour la friture. Cette interdiction était due aux règles spécifiques du règlement de copropriété et à l’opposition des autres copropriétaires.

Estimant que ces contraintes représentaient une information cruciale, nécessairement connue du cédant mais non révélée lors des négociations précontractuelles, M. T. assigna M. M. en indemnisation sur le fondement de l’article 1112-1 du code civil, considérant cette omission comme une violation du devoir précontractuel d’information.

La cour d’appel de Reims rejeta toutefois les prétentions de M. T., estimant que ce dernier n’avait pas démontré que la possibilité de faire de la friture constituait une condition déterminante de son consentement lors de l’acquisition.

Solution de la Cour de cassation

La Cour de cassation confirme fermement la position des juges d’appel, rappelant que le devoir d’information précontractuelle prévu par l’article 1112-1 du code civil se limite strictement aux informations ayant « un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties » et dont « l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre partie ».

La Cour souligne particulièrement que « les moyens, pris en leur première branche, qui postulent que le devoir d’information porte sur toute information ayant un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties, ne sont donc pas fondés ». Autrement dit, il ne suffit pas que l’information omise soit simplement pertinente ou utile ; elle doit être absolument déterminante du consentement.

De plus, la Cour valide expressément l’appréciation des juges du fond selon laquelle il n’était pas démontré de façon probante que « la possibilité de faire de la friture était une condition déterminante pour le consentement de M. T. ».

Les juges confirment ainsi que c’est bien au demandeur de démontrer le caractère déterminant de l’information omise.

Portée de l’arrêt

Cet arrêt constitue une clarification notable du devoir d’information précontractuelle et une limitation de son champ d’application.

Il impose aux parties une attention particulière quant à l’établissement précis du caractère déterminant d’une information lors des négociations précontractuelles.

Cette rigueur protège les contrats commerciaux d’une incertitude excessive sur la portée des obligations précontractuelles et rappelle aux contractants l’importance de clairement documenter leurs attentes déterminantes lors de la formation d’un contrat.

Cette décision aura donc des applications très concrètes et nécessitera d’être plus vigilant sur la nature déterminante d’éléments du contrat.

Par Olivier VIBERT, Avocat au Barreau de Paris,

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